Faut-il lire «La ballade du voleur au whisky» ?
Bien qu'américain, Julian Rubinstein n'a pas écrit ici un livre contant les tribulations inventées d'un outlaw du lointain far-west, mais plutôt la vraie vie d'un bandit du "close-east" (?!?) des années 90.
Vous n'en n'avez sans doute jamais entendu parler et pourtant Attila Ambrus, célèbre gardien de hockey (surtout par sa nullité) a défrayé la chronique hongroise pendant plus de 10 ans « grâce » à 27 hold-up et plus d'un demi-million de dollars de butin !
Avant chaque attaque, il se pochetronnait gentiment au whisky dans un troquet non loin de son objectif. Puis, affublé de postiches un peu pourris, il dévalisait gentiment banque, bureau de poste ou agence de voyages.
Oui, oui, gentiment !
Toujours poli et charmeur malgré son arme de poing, il veille à ne jamais tirer, voire arrive carrément avec un bouquet de fleurs pour les employées de banque ! Et même une fois avec une bouteille de champagne (vide) comme cadeau au chef de la police chargé de son cas.
Le lecteur a souvent du mal à croire que ce n'est pas une fiction mais bien la réalité !
Inutile de dire que, dans une Hongrie de années 90 gangrenée par des affaires politico-mafieuses hallucinantes, le « voleur au whisky » devient une quasi-légende. Il est vite vu comme le « Robin des bois » des années 90. Même si son butin finit surtout dans les caisses du casino du coin...
Mais plus qu'une "hagiographie" hallucinante d'un gentil malfrat, l'auteur nous livre, en parallèle, l'histoire de ce pays entre Orient et Occident dans des années charnières dont nous avons tous oublié les enjeux. La Hongrie fut le premier pays à « subir » une occidentalisation capitaliste à outrance et à en payer les frais, lourdement.
J'ai eu la chance de passer quelques jours à Budapest dans ces fameuses années 90.
Et je comprends mieux beaucoup de choses :
- les Mercedes et autres grosses cylindrées dernier cri garées à côté des Trabants pourries,
- le ballet de louches « porteurs de mallettes » dans le hall de notre hôtel (assez hallucinant de voir cela tellement c'était gros),
- les habitants faisant les courses dans des épiceries aux rayons plus ou moins remplis mais avec des caddies quasi-vides,
- les vitrines des boutiques croulant sous des monceaux de trucs inabordables pour 99 % des Hongrois,
- le magasin d'armes lourdes en plein « Champs Élysées » hongrois…
- et même la fameuse bouteille de whisky français (si, si) achetée à l'époque (au nom fleuri style : « Château Sainte-Marie ») !
Alors oui , précipitez-vous sur ce roman excellent, écrit dans un style enlevé, plein d'humour. On sent bien que l'auteur, très documenté (avec photos SVP), est tombé lui aussi sous le charme de ce gentleman cambrioleur.... Et, croyez-moi, je vous ai pas tout dit !
Le rappeur Gaxsta Zolee, dont Attila (ici en photo) était l'ami, écrira quelques morceaux sur le voleur au whisky. Tout cela sans savoir la véritable identité de ce dernier (ou alors on nous ment !). Si quelqu'un comprend le Hongrois j'aimerais bien savoir ce qui se dit dans ce titre...